Mystère...
Journal personnel de la directrice du lycée, Mme Tell.
29 Juin 1992
Enfin ! Quelle chance j'ai ! Et tous mes amis qui me disaient qu'à mon âge, je n'aurais jamais pu devenir cadre, eh bien il vont être bluffé maintenant. À peine un an après la fin de mes études, je décroche le poste de directrice d'un lycée. J'ai 24 ans, il est vrai que c'est un peu tôt, et lorsque j'ai annoncé la bonne nouvelle à mes parents, ils sont restés sceptiques.
"Méfie toi, je trouve cela assez étrange..." Avait-dit mon père. Mais pourquoi se méfier ? On ne blague pas avec l'Etat. Dés demain j'irais faire un tour dans ce bâtiment, on m'a raconté qu'il était totalement isolé, voire presque en dehors de la ville. Mais ce qui réussit à garder des élèves, c'est qu'il soit le seul lycée privé de la région. De plus j'ai appris que l'internat était gratuit et que tous les élèves y dormaient. Moi aussi je vais avoir ma chambre, je ne reverrais mes parents et mes sœurs qu'en fin de semaine.
Ah comme j'ai hâte d'être demain, j'espère qu'ils n'auront pas changé d'avis... Est ce que le bâtiment est en bon état au moins ?
Sylvie Tell
30 Juin 1992
[...]
1er Novembre 1992
La rentrée s'est passée à merveille. Les élèves étaient tous présents dès le premier jour et nous n'avons eu aucune dispute dans la semaine qui suivit. Afin d'éviter tout abus ou injustice dans l'internat, j'ai moi-même choisi à l'avance qui dormait avec qui et dans quelle chambre. Bien sûr j'ai un peu choisi au hasard, je ne les connaissais pas encore bien. Néanmoins je me suis contentée de mettre ensemble des personnes qui ne se connaissaient pas, tout en rajoutant ceux qui me semblaient être leurs amis dans les chambres les plus proches. Les professeurs quant à eux semblaient tous satisfaits, et malgré les nombreuses critiques que j'entendis de la part d'adolescents sur un professeur de mathématique et un d'histoire, tout semble bien aller. Les groupes séparés lors des pauses sont toujours les mêmes depuis mon enfance. Il y a les 'fashions', les 'racailles', les 'fans de jeux vidéos', les 'gothiques' etc ... Je me souviens bien que lorsque j'étais jeune, je faisais plutôt partie de ceux qui préféraient passer leur pause à converser avec un professeur sur autre chose que les cours au lieu de rejoindre mes amies.
Bon, si j'ai décidé de reprendre ce journal, ce n'est pas pour vous raconter mon enfance. Mais j'ai remarqué quelque chose d'assez étrange dans ce bâtiment. Par exemple la veille de son ouverture je vérifiais que toutes les salles de classes étaient prêtes, lorsqu'en passant derrière un mur du couloir j'entendis d'étranges bruits. Des bruits qui ressemblaient à des murmures. Etrange non ? D'autant plus que j'étais seule à ce moment, j'en suis sûre. Les personnes du secrétariat étaient toutes dans leur bureau. Je m'étais approchée du mur, puis le son s'éteignit aussi brusquement qu'il était apparu. C'était peut-être mon imagination, mais jamais encore elle ne m'avait joué un tour pareil. J'avais décidé de ne plus y faire attention dès le lendemain parce qu'il fallait que je me concentre plutôt sur la manière d'accueillir mes nouveaux élèves. Je pense d'ailleurs m'être débrouillée assez bien sur ce plan. Ils peuvent m'apprécier, me trouver cool au début mais je dois rester leur directrice avant tout, et je pense que s'ils s'imaginent pour certains pouvoir me marcher sur les pieds, ils me trouveront beaucoup moins sympathique.
Encore quelques événements louches aussi, ça peut paraître bizarre, espérons que je ne devienne pas parano, mais à chaque fois que la nuit tombe, j'ai l'impression que ce lycée prend vie dans un sens... imaginaire. Je sens des choses qui grouillent à l'intérieur sans que je ne sache quoi ni pourquoi. Là encore, c'est probablement mon imagination qui me joue des tours.
Je reprendrai ce journal un peu plus tard, aujourd'hui je suis fatiguée. Un de mes nouveaux élèves s'est déjà fait distingué, je le reçois dans mon bureau demain matin. En tout cas d'après ce que je sais sur sa bêtise, il ne s'en sortira pas sans au moins deux heures de colle un mercredi après midi...
Sylvie Tell
27 Janvier 1993
Des nuits que je ne dors plus... Mon cher journal, j'ai le regret de t'annoncer que j'arrêterais peut-être d'écrire. Déjà cela fais plusieurs mois que je n'avais pas repris mon auto-biographie ici, mon état et mon temps libre ne m'ayant pas encore permis de reprendre ce journal poussiéreux jusqu'ici . Non, ce n'est pas le lycée qui me rend aussi fatiguée et indisponible, mais une découverte bien mystérieuse qui a changé ma vie.
Tout a commencé un jour dont la date est sortie de mon esprit. J'avais l'intention de mettre un terme à cet énigme du lycée qui me paraissait 'hanté'. À ce moment, personne ne se doutait de rien. Parfois quelques suspicions à propos d'un murmure étrange, mais rien de bien méchant. Je rentrais dans mon bureau, bredouille pour m'assoir sur ma grande chaise noire. Je revenais d'une preuve d'autorité envers un élève pas très commode qui avait déclenché l'alarme incendie. Je lui avait offert la sanction prévue à ce genre d'événement, les heures de colles pour le mercredi après midi plus le samedi matin parce qu'il avait été insolent, puis je l'avais envoyé en cours pour me débarrasser de ce garçon. Je regardais les quelques plaintes à propos de la cantine qui ne serait pas aux goût des élèves depuis quelques temps. Il faut dire que le cuisinier principal est en arrêt maladie pour le moment et je n'ai pas pu trouver de remplacent.
Soudain, et je peux vous jurer que j'avais bien dormis la veille, un énorme coup de fatigue m'accabla et je ne pus m'empêcher de faire mon premier petit somme dans mon bureau. Dans mes rêves, j'entendis des voix qui semblaient venir d'autre part, comme si j'écoutais des personnes parler, alors que ces personnes se trouvaient juste à coté de mon corps endormi. Les paupières lourdes, je n'arrivais plus à les ouvrir et je ne savais plus si j'étais consciente ou toujours endormie. Ce que je savais en revanche, c'est que soit dans le rêve, soit dans le bureau, je n'étais pas seule...
- "Ils sont revenus... Que faire ?
- Ibisys n'est plus de ce monde... Nous ne pourrons pas lutter sans lui.
- Il nous en faut plus, beaucoup plus, et nous pourrons les vaincre enfin !
- Mais plus d'élus voudrait aussi dire plus d'entourage, il nous faudra être sûrs qu'aucun d'eux ne tombe où ne décide de devenir trop... puissants.
- Un dieu qui les guiderais dans le droit chemin.
- Oui... un Dieu qui soit capable de les désensorceler s'ils ne veulent pas aider.
- Crois tu que les nôtres soient d'accord ?
- Ce sont eux qui nous ont demandé d'aller chercher cette personne. Ils ont besoin d'un héros qui puisse régner à leur coté en partageant leur statut. Nous lui apprendrons ce qu'il doit savoir, il connaîtra tous ce que les Dieux connaissent, puis lorsqu'il sera prêt...
- Le cauchemar prendra fin..."
Je me souviens avoir entrouvert les paupières, la nuit venait de tomber. Avais-je dormis si longtemps ? Pourquoi personne ne m'avait réveillé ? D'un geste lent, j'écartais des mèches de cheveux encore longues qui m'entravaient la vue. Je les ai coupé court que plus longtemps après pour plus d'autorité auprès des personnes que je fréquentait et aussi donner l'air plus mature.
Malgré toute ma volonté pour partir, mes membres ne voulurent plus bouger d'un pouce. Je sentit avec horreur que mes paupières se fermaient à nouveau au fur et à mesure que l'obscurité arrivait, poussée par la nuit. Finalement mon corps s'endormit à nouveau, mais mon esprit s'envola pour un monde qui ne ressemblait pas qu'à un simple rêve, et dont ma présence était sollicitée...
La suite...
